Nicolas prit une grande inspiration et s’avança vers la fourmilière, suivi par ses nouveaux alliés. La Reine des Termites Noirs leva sa tête couronnée d’épines et le fixa de ses yeux rouge sang.
« Ainsi, c’est toi l’humain qui ose défier mon royaume », gronda-t-elle d’une voix qui faisait trembler la terre. Son Mur de Découragement s’étendit vers Nicolas comme un brouillard glacé.
« Je sens ta peur, petit humain. Elle me nourrit. Bientôt, tu seras paralysé comme toutes ces fourmis pathétiques. »
Effectivement, Nicolas sentit ses jambes devenir lourdes, sa respiration se couper. L’Ombre Chuchotante, bien que diminuée, essayait de fusionner avec l’aura de la Reine Noire.
« Tu ne peux pas chanter », chuchota-t-elle. « Tu es trop timide, souviens-toi… »
Mais Nicolas entend alors la voix de Formica, faible mais déterminée : « Nicolas… tu es notre seul espoir… »
Il vit toutes les fourmis figées autour de leur reine Myrmica, les bébés fourmis terrifiés dans leurs tunnels, Professeur Lucane qui luttait pour rester debout contre le Mur de Découragement.
Puis il pensa à sa maman qui élevait courageusement Rémy toute seule, à son papa qui affrontait ses peurs en mission pour protéger sa famille, à Estelle qui l’avait défendu même malade, et à ces nouveaux amis qui lui faisaient maintenant confiance.
« Non », dit-il d’une voix qui se raffermissait. « Je ne suis pas juste timide. Je suis Nicolas, l’Interprète des Petits Peuples, et j’ai des amis qui croient en moi. »
Il commença à fredonner l’Hymne du Courage. Sa voix était d’abord faible, tremblante, mais Maestro Grillo vint l’accompagner de sa petite mélodie.
« Petit je suis, mais grand mon cœur… »
Maxime, même s’il ne comprenait pas tout, commença à taper dans ses mains pour donner le rythme. Léa et les autres enfants l’imitèrent.
« Même effrayé, je reste frondeur… »
La voix de Nicolas gagnait en force. La Pierre de Communication brillait de plus en plus, et tous les Petits Peuples – coccinelles, grillons, libellules – vinrent se joindre au chant.
« Avec mes amis, rien ne m’arrête… »
L’Ombre Chuchotante commença à se détacher de Nicolas. Le Mur de Découragement de la Reine Noire vacillait.
« Impossible ! », rugit la Reine. « Mon pouvoir est absolu ! »
Mais Nicolas chantait maintenant à pleins poumons, et sa voix portait l’écho de tous ceux qui croyaient en lui :
« Ensemble on gagne, la bataille est faite ! »
Soudain, le Mur de Découragement se fissura comme une vitre, puis explosa en mille morceaux ! Toutes les fourmis retrouvèrent instantanément leur mobilité et leur courage.
La Reine des Termites Noires, privée de son pouvoir, recula en titubant. « C’est impossible ! Comment un si petit humain peut-il… »
« Parce qu’il n’est pas seul », répondit la voix majestueuse de la Reine Myrmica qui apparut enfin, entourée de ses garde-fourmis. « Et parce qu’il a compris quelque chose que tu ne comprends pas : la vraie force vient de l’union et du courage partagé, pas de la peur imposée. »
Les fourmis, libérées de leur paralysie, encerclèrent les termites. Mais au lieu de les attaquer, elles formèrent simplement une barrière protectrice autour de leur territoire.
« Partez », ordonna Nicolas d’une voix ferme à la Reine Noire. « Et ne revenez plus terroriser les Petits Peuples. »
La Reine des Termites, humiliée, battit en retraite avec son armée.
C’est alors que Nicolas se retourna vers L’Ombre Chuchotante, qui était maintenant toute petite et tremblante.
« Et toi ? », lui demanda-t-il doucement. « Pourquoi me faisais-tu si peur ? »
L’Ombre leva vers lui des yeux remplis de larmes grises. « Je… j’avais peur que tu sois blessé, comme moi j’ai été blessée par les moqueries. Je voulais juste… te protéger. »
Nicolas la regarda avec compassion. « Je comprends. Mais tu sais quoi ? Tu peux rester avec moi, mais plus pour me paralyser. Tu peux m’aider à être prudent sans m’empêcher d’être courageux. »
L’Ombre Chuchotante sourit pour la première fois, et sa couleur grise devint un joli gris argenté, comme celui des nuages qui annoncent un arc-en-ciel.
« Je veux bien essayer », murmura-t-elle.
Alors, une grande fête commença dans la cour. Tous les Petits Peuples chantaient et dansaient. Les enfants, qui pouvaient toujours les voir grâce à la Pierre de Communication, riaient et applaudissaient.
« Nicolas », dit Maxime, « excuse-moi de m’être moqué. Ce que tu fais, c’est vraiment génial. »
« Oui ! », ajouta Léa. « Tu peux nous apprendre à parler aux insectes ? »
Nicolas sourit, le cœur rempli de joie. Il n’avait plus besoin de son mur pour se sentir en sécurité. Il avait découvert que sa timidité pouvait coexister avec son courage, que sa passion pour les insectes était un don précieux, et que même les plus petits peuvent accomplir de grandes choses quand ils croient en eux.
Professeur Lucane s’approcha de lui. « Félicitations, Nicolas. Tu es maintenant officiellement le Premier Ambassadeur entre les Humains et les Petits Peuples de ton école. »
Et pour la première fois de sa vie, Nicolas se sentit vraiment fier d’être lui-même : Nicolas, cinq ans, passionné d’insectes, un peu timide mais très courageux quand il le fallait, et surtout… entouré d’amis qui l’acceptaient tel qu’il était.
Quand Estelle revint le lendemain, elle trouva Nicolas entouré d’un groupe d’enfants fascinés par ses histoires de fourmis. Il n’avait plus besoin de son mur, mais il savait qu’il resterait toujours spécial : le garçon qui parlait aux insectes et qui avait appris que la différence était une force, pas une faiblesse.
Et l’Ombre Chuchotante ? Elle était toujours là, mais transformée en Ombre Protectrice, lui rappelant gentiment d’être prudent tout en l’encourageant à être brave. Parfois, avoir un peu peur, c’est normal – l’important, c’est de ne pas laisser cette peur nous empêcher de vivre nos plus belles aventures.
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L’aventure continue !
Identifiant de l’histoire : 70