• Enfant-héros : Léo
  • Âge : 15 ans
  • Personnalité : timide, créatif, sensible, rêveur, têtu, triste
  • Passions : Léo adore le dessin et la photographie. Il passe beaucoup de temps à créer des œuvres d’art et à capturer des moments avec son appareil photo. Il aime aussi écouter de la musique et jouer de la guitare.
  • Autres personnages : Sa mère (Marie), son père (Pierre), sa petite sœur (Anïs), son meilleur ami (Tom) et sa chatte (Luna).
  • Thème : Relations
  • Problématique : Intimidation et moqueries
  • Détails : Léo traverse une période très difficile à l’école. Ses notes ont chuté et il semble avoir perdu tout intérêt pour ses études. Il passe de plus en plus de temps seul dans sa chambre et évite de parler de ce qui le préoccupe. J’ai découvert récemment qu’il est victime de harcèlement scolaire. Il reçoit des messages méchants sur les réseaux sociaux et se fait souvent exclure par ses camarades de classe. Cette situation le rend très anxieux et déprimé. J’ai essayé de lui parler, mais il se referme sur lui-même et refuse de demander de l’aide. J’ai peur que cela n’affecte gravement sa santé mentale et son avenir. J’aimerais trouver un moyen de l’aider à surmonter cette épreuve, à retrouver confiance en lui et à se sentir soutenu.
  • Style d’histoire : Fantasy
  • Identifiant de l’histoire : 38

— ⭐ —

Léo se réveilla en sursaut, trempé de sueur. Les cauchemars revenaient chaque nuit depuis trois jours — depuis que Luna avait disparu. Dans ses rêves, il la voyait prisonnière du Moqueur, enfermée dans une cage d’ombre, sa lumière s’affaiblissant peu à peu.

Il s’assit sur son lit, passant une main tremblante dans ses cheveux humides. L’absence de Luna créait un vide douloureux. Sans sa guidance, il se sentait perdu, incertain de la marche à suivre.

Son téléphone vibra sur sa table de nuit. Un message de Tom : « Toujours rien ? »

« Non, » répondit-il simplement.

Depuis leur retour de Lumigraph, Tom était devenu son roc, son confident. Chaque jour après les cours, ils se retrouvaient pour élaborer des plans, pour pratiquer les techniques que Luna avait enseignées à Léo. Tom ne pouvait pas créer de portails ou de symboles lumineux lui-même, mais sa présence, son soutien indéfectible, valaient tous les pouvoirs du monde.

Léo se leva et s’approcha de son bureau où reposait le carnet bleu. Il l’ouvrit à la page du dessin forestier et retint un hoquet de surprise. La corruption s’était considérablement étendue — plus des trois quarts de la forêt étaient maintenant envahis par les ténèbres grises. La clairière du Sanctuaire brillait encore, comme une île de lumière dans un océan d’ombre, mais elle semblait plus petite, plus fragile.

Un coup léger à sa porte le fit sursauter. Il referma précipitamment le carnet.

« Entrez, » dit-il, s’efforçant de paraître normal.

La porte s’ouvrit sur Anaïs. Sa petite sœur avait l’air préoccupée, ses yeux bleus scrutant son visage avec inquiétude.

« Tu n’as pas l’air bien, » dit-elle sans préambule. « Et Luna a disparu. Maman et Papa s’inquiètent aussi, tu sais. »

Léo détourna le regard. « Je vais bien. Luna reviendra, elle fait ça parfois. »

Anaïs s’avança dans la chambre, fermant la porte derrière elle. « Arrête de mentir. Je sais que quelque chose ne va pas, et ça n’est pas seulement le harcèlement à l’école. »

Léo la regarda avec surprise. « Comment sais-tu pour ça ? »

« Je ne suis pas stupide, » répondit-elle en croisant les bras. « Et puis, j’ai vu les messages sur ton téléphone l’autre jour, quand tu l’as laissé sur la table. Tu devrais vraiment mettre un code. »

Léo soupira, à la fois gêné d’avoir été découvert et soulagé de ne plus avoir à prétendre. « Je ne voulais pas vous inquiéter. »

« Eh bien, c’est raté. » Anaïs s’assit sur le lit, tapotant la place à côté d’elle. « Parle-moi. Peut-être que je peux aider. »

Léo hésita, puis s’assit à côté de sa sœur. Pouvait-il lui dire la vérité ? Toute la vérité ? Luna avait averti contre le partage trop large du secret de Lumigraph, mais Anaïs avait déjà montré une sensibilité particulière — elle avait vu les dessins bouger.

« C’est… compliqué, » commença-t-il prudemment.

« J’ai tout mon temps, » répondit Anaïs avec un petit sourire encourageant.

Léo prit une profonde inspiration et décida de se lancer. « Tu te souviens de mon carnet de dessin ? Celui à la couverture bleue ? »

Anaïs hocha la tête. « Celui où tu dessines ces forêts bizarres qui semblent bouger ? »

« Exactement. Ce carnet… il est spécial. Il me permet de créer des portails vers un autre monde appelé Lumigraph. »

Il s’attendait à ce qu’Anaïs rie ou se moque de lui, mais elle se contenta de le regarder avec curiosité. « Continue, » dit-elle simplement.

Encouragé, Léo lui raconta tout — sa première découverte du carnet, Luna la Gardienne, Le Moqueur et ses Ombres Chuchotantes, la connexion avec le harcèlement qu’il subissait, et enfin, la disparition de Luna lors de leur dernière visite avec Tom.

Quand il eut terminé, Anaïs resta silencieuse un long moment, semblant digérer toutes ces informations. Puis, à la grande surprise de Léo, elle hocha la tête comme si tout cela avait parfaitement sens.

« Je savais que Luna n’était pas un chat ordinaire, » dit-elle finalement. « Elle me regardait toujours comme si elle comprenait exactement ce que je disais. »

« Tu… tu me crois ? » balbutia Léo.

« Bien sûr que je te crois. Pourquoi inventerais-tu quelque chose d’aussi élaboré ? » Elle fit une pause. « Et puis, j’ai toujours su que tes dessins étaient spéciaux. Ils m’ont toujours donné des… sensations. Comme si je pouvais presque entendre la forêt, sentir l’air. »

Léo la regarda avec un nouvel intérêt. « Luna a dit que certaines personnes sont plus sensibles aux frontières entre les mondes. Tu dois être l’une d’elles. »

« Cool, » dit Anaïs avec un sourire. « Alors, quel est le plan pour sauver Luna et arrêter ce Moqueur ? »

« Je ne sais pas, » admit Léo. « Sans Luna pour nous guider, je ne suis pas sûr de savoir quoi faire. Et je ne veux pas retourner dans Lumigraph sans être préparé. Le Moqueur devient plus fort chaque jour. »

Anaïs réfléchit un instant. « Tu as dit que Le Moqueur se nourrit de la peur, de la honte, des doutes ? »

« Oui. »

« Et qu’il peut influencer notre monde, en amplifiant ces émotions chez les gens ? »

« C’est ce que Luna m’a expliqué. »

« Alors peut-être que la bataille ne commence pas dans Lumigraph, » suggéra Anaïs. « Peut-être qu’elle commence ici, dans notre monde, en affrontant tes propres peurs et doutes. »

Léo considéra cette idée. C’était logique d’une certaine façon — si Le Moqueur tirait sa force des émotions négatives, alors réduire ces émotions pourrait l’affaiblir.

« Mais comment ? » demanda-t-il. « Comment je suis censé arrêter le harcèlement ? J’ai déjà essayé d’ignorer, de me défendre, de le signaler… Rien ne fonctionne. »

« Peut-être qu’on attaque le problème sous le mauvais angle, » dit Anaïs pensivement. « Si ces types sont influencés par Le Moqueur, peut-être qu’ils sont aussi pleins de peur et de doute. Peut-être qu’au lieu de les combattre, il faut… je ne sais pas… les comprendre ? »

Léo se rappela l’image de Lucas pleurant seul dans sa chambre, révélée par l’Étang des Reflets. « Tu pourrais avoir raison, » murmura-t-il. « L’Étang a montré que Lucas souffre aussi, à sa façon. »

Avant qu’Anaïs ne puisse répondre, la voix de leur mère résonna depuis le rez-de-chaussée. « Les enfants ! Le dîner est prêt ! »

« On devrait y aller, » dit Anaïs en se levant. À la porte, elle se retourna. « Je suis avec toi dans cette histoire, Léo. On va trouver Luna et arrêter Le Moqueur. »

Léo lui sourit, sentant un poids se lever de ses épaules. Avoir Anaïs comme alliée lui donnait un nouveau courage.

Le lundi matin, Léo arriva au lycée avec une détermination renouvelée. Il avait passé le weekend à pratiquer ses techniques de Luminographe avec Tom et Anaïs, dessinant des symboles de protection et de vérité, se préparant mentalement à affronter ses tourmenteurs d’une nouvelle façon.

Mais à peine avait-il franchi les portes du lycée qu’une sensation glaciale l’envahit. Quelque chose avait changé. L’atmosphère même semblait plus lourde, comme si un brouillard invisible pesait sur l’établissement.

Dans les couloirs, les élèves paraissaient plus maussades, plus agressifs. Les conversations étaient ponctuées d’éclats de rire moqueurs, de commentaires blessants. Même les professeurs semblaient tendus et irritables.

« Tu le sens aussi ? » demanda Tom, qui l’avait rejoint devant son casier. « C’est comme si tout le monde était de mauvaise humeur aujourd’hui. »

« Ce n’est pas juste une mauvaise humeur, » murmura Léo, scrutant les visages autour d’eux. « C’est Lui. Le Moqueur. Il étend son influence. »

Au bout du couloir, Léo aperçut Lucas et sa bande. Habituellement, il aurait détourné le regard, espérant passer inaperçu. Mais aujourd’hui, il observa attentivement. Lucas avait les yeux cernés, le teint pâle, et malgré son air arrogant habituel, quelque chose dans sa posture trahissait une profonde fatigue.

« Il a l’air mal en point, » remarqua Tom. « Tu crois que… ? »

« Je ne sais pas, » répondit Léo. « Mais je vais le découvrir. »

La matinée passa lentement, la sensation oppressante s’intensifiant au fil des heures. Durant la pause déjeuner, Léo et Tom s’isolèrent dans un coin calme de la bibliothèque.

« Quelque chose ne va vraiment pas, » dit Tom en baissant la voix. « Tu as vu Mme Laurent ? Elle a hurlé sur Emma juste parce qu’elle a demandé une explication. Ce n’est pas son genre. »

Léo hocha la tête, sortant discrètement son carnet. « Je pense que Le Moqueur a trouvé un moyen d’amplifier son influence sans avoir besoin que je retourne dans Lumigraph. Peut-être à cause de notre dernière visite, ou peut-être… »

« À cause de Luna, » compléta Tom sombrement. « S’il la retient prisonnière, il pourrait utiliser son pouvoir de gardienne d’une façon ou d’une autre. »

Léo ouvrit le carnet à une nouvelle page et commença à dessiner rapidement — un petit symbole circulaire avec des motifs entrecroisés que Luna lui avait enseigné pour détecter la présence des Ombres.

Le dessin s’illumina faiblement, puis plus intensément, avant de projeter un halo de lumière bleue autour d’eux. Dans cette lumière, ils pouvaient voir de fines volutes de brume grise flottant dans l’air de la bibliothèque, s’enroulant autour des étudiants qui travaillaient en silence.

« Des Ombres, » souffla Léo. « Elles sont partout. »

« Qu’est-ce qu’on peut faire ? » demanda Tom, regardant avec inquiétude les filaments gris qui semblaient complètement invisibles à tous sauf à eux.

Avant que Léo ne puisse répondre, son téléphone vibra. Un message d’un numéro inconnu : « Tu croyais pouvoir te cacher derrière ton petit ami roux ? On sait tout sur toi, Léo. Rendez-vous après les cours derrière le gymnase. Viens seul, ou on s’en prendra à lui aussi. »

Léo montra le message à Tom, qui fronça les sourcils. « C’est un piège évident. Tu ne peux pas y aller. »

« Je dois y aller, » répondit Léo. « Pas pour eux, mais pour moi. Pour affronter ma peur. C’est peut-être notre chance de comprendre ce qui se passe réellement. »

« Alors je viens avec toi, » insista Tom.

« Non. Le message dit de venir seul, et je ne veux pas qu’ils s’en prennent à toi. Mais j’ai un plan. »

Léo sortit un petit carnet de croquis de son sac et dessina rapidement deux symboles identiques — des cercles avec des motifs rayonnants qui ressemblaient presque à des soleils stylisés.

« Des amulettes de connexion, » expliqua-t-il en détachant la page et en la déchirant en deux, donnant un symbole à Tom. « Luna m’a montré comment les créer. Tant que nous les portons, nous pourrons communiquer par la pensée, comme elle le faisait avec moi. Du moins, en théorie. »

« En théorie ? » Tom semblait sceptique.

« Je n’ai jamais essayé avec un humain. Mais ça devrait fonctionner. Garde-le sur toi, reste à distance mais pas trop loin. Si quelque chose tourne mal… »

« Je viendrai te chercher, » promit Tom, pliant soigneusement le symbole et le glissant dans sa poche.

À la fin des cours, le ciel s’était assombri, comme si des nuages d’orage s’étaient rassemblés au-dessus du lycée. Léo se dirigea vers le gymnase, le cœur battant mais résolu. Dans sa poche, il serrait le symbole de connexion, se concentrant sur la présence rassurante de Tom quelque part derrière lui.

Derrière le gymnase, dans une zone peu fréquentée bordée d’arbres, Lucas attendait avec trois de ses amis. Leurs visages étaient tirés, leurs yeux injectés de sang, comme s’ils n’avaient pas dormi depuis des jours.

« Te voilà enfin, » lança Lucas d’une voix rauque. « Le petit artiste a décidé de se montrer. »

Léo les observa attentivement. Quelque chose n’allait vraiment pas chez eux. Leur posture, leur voix, leur regard… tout semblait légèrement… décalé.

« Qu’est-ce que vous me voulez ? » demanda-t-il calmement, surpris par sa propre assurance.

« Te donner une leçon, » répondit l’un des amis de Lucas. « T’apprendre à rester à ta place. »

Léo remarqua alors les fines volutes de brume grise qui s’enroulaient autour d’eux, particulièrement denses autour de leurs têtes, comme des serpents de fumée chuchotant à leurs oreilles.

« Vous n’êtes pas vous-mêmes, » dit Léo, réalisant soudain la gravité de la situation. « Vous êtes influencés par quelque chose que vous ne comprenez pas. »

Lucas ricana, mais son rire sonnait faux, presque mécanique. « Toujours aussi bizarre. C’est pour ça que personne ne peut te supporter. »

Les garçons commencèrent à l’encercler lentement. Léo sentait la peur monter en lui, mais il la maintint sous contrôle, se concentrant sur ce qu’il avait appris. Les Ombres se nourrissaient de peur — il ne leur donnerait pas cette satisfaction.

« Je sais que tu souffres, Lucas, » dit Léo, fixant directement son tourmenteur. « J’ai vu ta douleur. Je sais que tu pleures seul dans ta chambre. »

Lucas vacilla, comme frappé physiquement par ces paroles. « Qu’est-ce que tu racontes ? Tu m’espionnes maintenant ? »

« Non. Mais je sais reconnaître la souffrance derrière la colère. Je la vois tous les jours dans le miroir. »

Les Ombres autour de Lucas s’agitèrent violemment, comme perturbées par cette conversation inattendue. Les autres garçons échangèrent des regards confus.

« Ferme-la, » siffla Lucas, mais sa voix tremblait. « Tu ne sais rien de moi. »

« Je sais que tu n’es pas ce monstre que tu prétends être, » continua Léo, faisant un pas vers lui. « Je sais que les Ombres te chuchotent des choses, qu’elles alimentent ta colère et ta peur. »

« De quoi il parle ? » demanda l’un des garçons, soudain mal à l’aise.

Les Ombres s’épaississaient autour d’eux, formant presque un cocon de brume grise. Léo sentit une présence plus sinistre se manifester — comme si quelque chose observait à travers les yeux de Lucas.

« Tu crois pouvoir les sauver, petit Luminographe ? » La voix qui sortit de la bouche de Lucas n’était pas la sienne — c’était la voix du Moqueur, ce mélange de chuchotements superposés. « Ils sont à moi maintenant, tout comme ta précieuse gardienne. »

Les autres garçons reculèrent, visiblement effrayés par le changement chez leur ami. Lucas, ou plutôt la chose qui parlait à travers lui, sourit d’un sourire qui n’avait rien d’humain.

« Où est Luna ? » exigea Léo, serrant les poings. « Qu’as-tu fait d’elle ? »

« Elle est en sécurité, dans ma Salle des Miroirs, » répondit Le Moqueur à travers Lucas. « Sa lumière s’affaiblit jour après jour, alimentant mon pouvoir. Bientôt, elle ne sera plus qu’une ombre, tout comme toi. »

Léo sentit une vague de colère monter en lui. « Libère-la ! »

« Pourquoi le ferais-je ? Grâce à elle, je peux maintenant atteindre ton monde plus facilement. Regarde autour de toi — je suis déjà partout. Chaque insulte, chaque regard méprisant, chaque message haineux… c’est moi. J’ai toujours été là, me nourrissant de la misère que vous créez si généreusement. »

Dans sa poche, le symbole de connexion chauffait. Léo pouvait sentir la présence de Tom, sa préoccupation, sa volonté d’intervenir.

« *Pas encore,* » pensa-t-il intensément, espérant que Tom recevrait le message. « *Je dois en savoir plus.* »

« Pourquoi moi ? » demanda Léo à voix haute. « Pourquoi me cibler spécifiquement ? »

Le Moqueur ricana à travers Lucas. « Parce que tu es un Luminographe, bien sûr. Ton pouvoir de création est l’antithèse de mon pouvoir de destruction. Ta capacité à transformer la douleur en beauté me répugne. Je préfère que la douleur reste douleur, qu’elle se multiplie, qu’elle se propage comme une maladie. »

Soudain, les yeux de Lucas roulèrent dans leurs orbites, et il s’effondra au sol. Les Ombres qui l’entouraient se dispersèrent momentanément, confuses.

Les autres garçons, libérés de l’emprise la plus forte, regardaient la scène avec horreur. « Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce qui lui arrive ? » s’écria l’un d’eux.

Mais avant que Léo ne puisse répondre, l’air autour d’eux se déchira littéralement, comme un rideau qu’on aurait fendu. À travers cette déchirure, Léo pouvait voir un lieu sombre et déformé — une salle immense remplie de miroirs de toutes tailles, chacun reflétant non pas le présent, mais des scènes de moquerie, d’humiliation, de souffrance.

Au centre de cette salle, enchaînée à un grand miroir central, se trouvait Luna. Son pelage normalement noir était devenu gris terne, et elle semblait à peine consciente.

« Luna ! » cria Léo, faisant un pas vers la déchirure.

Mais la faille commença à s’élargir, s’étendant comme une bouche vorace. Une force invisible tirait Léo vers elle.

« *Tom !* » appela-t-il mentalement, serrant le symbole de connexion. « *À l’aide !* »

En quelques secondes, Tom apparut, courant vers eux. Mais il était trop tard — la force d’attraction était trop puissante. Léo sentit ses pieds quitter le sol, son corps aspiré vers la déchirure interdimensionnelle.

« Léo ! » cria Tom, plongeant pour attraper sa main.

Leurs doigts se touchèrent brièvement, mais la force était implacable. La dernière chose que Léo vit fut le visage horrifié de son ami avant d’être complètement englouti par la faille.

Le monde autour de lui tourbillonna en un kaléidoscope de couleurs et de sons discordants. Puis vint l’impact — dur, froid, brutal.

Quand il reprit conscience, Léo était allongé sur un sol de marbre noir. Il se redressa péniblement, découvrant avec horreur qu’il se trouvait au centre de la Salle des Miroirs qu’il avait entrevue.

Chaque miroir reflétait une scène différente — lui-même recevant des messages haineux, Tom se faisant bousculer pour avoir pris sa défense, Anaïs pleurant en découvrant des commentaires cruels sur son frère, ses parents discutant avec inquiétude de son comportement renfermé.

« Bienvenue dans mon domaine, Luminographe, » résonna la voix du Moqueur, mais cette fois sans intermédiaire. L’entité se matérialisa devant lui, imposante dans sa cape de ténèbres, son masque blanc semblant luire d’une lumière malsaine. « Ici, tu vas découvrir la vérité que tu cherches tant. »

Léo se releva complètement, cherchant Luna du regard. Il la repéra finalement, enchaînée au miroir central comme dans la vision. Son cœur se serra en voyant l’état affaibli de sa gardienne.

« La vérité ? » répéta-t-il, gagnant du temps, cherchant une issue. « Quelle vérité ? »

« La vérité sur toi-même, bien sûr. » Le Moqueur fit un geste large, et tous les miroirs se transformèrent pour montrer Léo — des versions différentes de lui, certaines recroquevillées de peur, d’autres en larmes, d’autres encore au visage déformé par la rage ou la honte. « Regarde-toi, vraiment. Vois ce que tu es au fond. Faible. Pathétique. Incapable de te défendre ou de défendre ceux que tu aimes. »

Léo détourna les yeux, mais un autre miroir captait immédiatement son regard, lui montrant une autre facette de sa vulnérabilité. C’était comme si les miroirs lisaient dans son âme, extrayant chaque doute, chaque peur, chaque moment de faiblesse pour les amplifier jusqu’à l’insupportable.

« Tu n’es rien, » continua Le Moqueur, tournant autour de lui. « Un accident de la nature, un Luminographe sans talent ni but. Je te propose un marché : renonce à ton don, renonce à ton carnet, et je te laisserai partir. Je libérerai même ta précieuse gardienne. »

Léo regarda Luna, qui avait légèrement relevé la tête. Dans ses yeux verts affaiblis, il pouvait voir un avertissement, une supplication de ne pas écouter.

« Et si je refuse ? » demanda-t-il, sa voix plus ferme qu’il ne l’aurait cru possible.

« Alors tu resteras ici pour toujours, à contempler tes échecs et tes faiblesses, jusqu’à ce que ton esprit se brise. Ta lumière alimentera mes Ombres, tout comme celle de ta gardienne le fait actuellement. »

Léo ferma les yeux, tentant de bloquer les images impitoyables des miroirs. Il devait réfléchir, trouver une solution. Luna lui avait enseigné que son pouvoir résidait dans l’authenticité de ses émotions. Il devait puiser dans quelque chose de plus fort que la peur.

Il plongea la main dans sa poche, où se trouvait toujours le symbole de connexion. Il le serra fort, pensant à Tom, à Anaïs, à ses parents. Même loin d’eux, il n’était pas seul.

« Je ne renoncerai jamais à mon don, » dit-il finalement, ouvrant les yeux pour affronter Le Moqueur. « Parce que ce n’est pas une malédiction, c’est une partie de moi. Et je ne suis pas ce que tes miroirs montrent. Je suis bien plus que mes peurs et mes faiblesses. »

Le Moqueur émit un son sifflant de colère. « Alors contemple ta fin, Luminographe. Sans ton carnet, sans tes crayons, que peux-tu faire ici ? Tu es impuissant dans mon domaine. »

C’était vrai — son carnet et ses crayons étaient restés dans le monde réel. Mais Léo se rappelait les paroles de Luna : « *Ce n’est pas le dessin qui a du pouvoir, c’est ce qu’il représente en toi.* »

Il regarda autour de lui, observant le sol de marbre noir. Peut-être n’avait-il pas besoin d’un crayon et d’un papier. Peut-être que l’intention, l’émotion, la visualisation étaient suffisantes.

Lentement, il s’accroupit et commença à tracer du doigt sur le sol le symbole solaire qu’il avait créé pour repousser les Ombres. Il y mit toute sa concentration, toute sa volonté, visualisant chaque ligne, chaque courbe, chaque détail avec une précision parfaite.

À sa grande surprise, son doigt laissa une trace lumineuse sur le sol, comme s’il dessinait avec de la lumière liquide.

Le Moqueur recula, visiblement surpris. « Impossible ! »

Léo continua, son cœur battant d’espoir. Le symbole prenait forme, émettant une lueur dorée qui contrastait violemment avec l’atmosphère oppressante de la salle.

« Arrête ! » ordonna Le Moqueur, lançant des volutes d’ombre vers Léo.

Mais le symbole, bien qu’incomplet, émettait déjà une aura protectrice qui repoussait les attaques. Léo acheva le dessin d’un geste fluide, et une onde de lumière dorée se répandit dans toute la salle.

Les miroirs tremblèrent, leurs images se brouillant. Certains se fissurèrent, d’autres changèrent pour montrer des scènes plus positives — Léo riant avec Tom, dessinant paisiblement avec Luna à ses côtés, recevant les encouragements de ses parents.

Le Moqueur hurla de rage et de douleur, son masque blanc se fissurant pour révéler… rien. Il n’y avait pas de visage derrière, juste un vide tourbillonnant, comme si l’entité n’était qu’une façade sans substance réelle.

Léo profita de cette distraction pour courir vers Luna. Les chaînes qui la retenaient semblaient moins solides, affaiblies par la lumière du symbole.

« Luna, » murmura-t-il en s’agenouillant près d’elle. « Tiens bon. Je vais te sortir d’ici. »

« Léo, » répondit-elle faiblement. « Tu es venu… malgré le danger. »

« Bien sûr que je suis venu. Tu es ma gardienne, mon amie. »

Il tenta de briser les chaînes, mais elles résistaient encore, malgré leur affaiblissement. Derrière lui, Le Moqueur se ressaisissait, rassemblant ses Ombres pour une contre-attaque.

« Tu ne peux pas nous sauver tous les deux, » dit Luna. « Sa force vient de ces miroirs. Ils amplifient la douleur, la peur, la honte de milliers de personnes. Tant qu’ils existent, il trouvera le moyen de revenir. »

Léo regarda autour de lui, réalisant l’ampleur du problème. Il ne pouvait pas détruire tous ces miroirs seul. Même son symbole lumineux n’était qu’une défense temporaire.

« Que dois-je faire ? » demanda-t-il, désespéré.

« Trouve le miroir primordial, » répondit Luna. « Celui auquel je suis enchaînée. C’est le premier, celui qui a donné naissance à tous les autres. Si tu peux le purifier, les autres suivront. »

Le miroir central était immense, au moins trois mètres de haut, encadré d’obsidienne sculptée de formes torturées. Sa surface ne reflétait pas une image fixe mais un tourbillon constant de visages souffrants, de rires cruels, de larmes silencieuses.

« Comment le purifier ? » demanda Léo, sentant le temps presser alors que Le Moqueur s’approchait, traînant derrière lui un manteau d’ombres de plus en plus dense.

« Avec la vérité, » répondit simplement Luna. « Pas celle qu’il veut te faire voir, mais ta vérité. Celle que tu portes en toi, au-delà de la peur. »

Léo se tourna vers le miroir, posant ses mains sur sa surface froide. À son contact, le tourbillon d’images s’accéléra, comme cherchant frénétiquement à trouver la pire version possible de lui-même.

« Assez ! » cria-t-il, et étonnamment, le tourbillon ralentit. « Montre-moi ce que je suis vraiment. »

Le miroir sembla hésiter, puis son reflet apparut — non pas déformé ou amplifié dans ses faiblesses, mais simplement lui. Léo, avec ses cheveux bruns en désordre, ses yeux fatigués mais déterminés, ses épaules légèrement voûtées par l’habitude de se faire petit.

« Je vois mes peurs, » dit-il au miroir, sentant instinctivement que c’était la voie à suivre. « Je vois mes doutes, mes faiblesses. Mais ce n’est pas tout ce que je suis. »

Le reflet dans le miroir commença à changer subtilement — ses épaules se redressèrent légèrement, ses yeux s’illuminèrent d’une lueur de confiance.

« Je suis un artiste. Je suis un ami. Je suis un frère et un fils. Je suis un Luminographe. »

À chaque affirmation, son reflet se transformait un peu plus, devenant plus lumineux, plus assuré, plus authentique.

« Et surtout, » continua-t-il, sentant une vérité profonde monter en lui, « je ne suis pas défini par ce que les autres disent de moi ou pensent de moi. Je me définis moi-même, par mes choix, par mon courage, par ma capacité à me relever après chaque chute. »

Le miroir commença à vibrer sous ses mains, émettant une lueur qui n’était plus malsaine mais claire et pure.

« Non ! » rugit Le Moqueur derrière lui. « Arrête ça immédiatement ! »

Mais Léo ne l’écoutait plus. Il était complètement absorbé dans sa connexion avec le miroir, avec son vrai reflet, avec sa vérité intérieure.

« Tu n’as pas de pouvoir sur moi, » dit-il, non pas au miroir mais au Moqueur. « Tu te nourris de peur, mais je choisis de ne plus avoir peur. Tu te nourris de honte, mais je choisis de ne plus avoir honte. Tu te nourris de doute, mais je choisis de croire en moi. »

Le miroir explosa soudain en une gerbe de lumière aveuglante, non pas en se brisant mais en se transformant, devenant une fenêtre lumineuse qui montrait un Lumigraph restauré, baigné de soleil, vibrant de couleurs et de vie.

Les chaînes retenant Luna se désintégrèrent en poussière d’ombre. Autour d’eux, tous les autres miroirs suivaient l’exemple du miroir primordial, se transformant en fenêtres vers des lieux de beauté et d’espoir.

Le Moqueur hurla, son corps de ténèbres se dissolvant comme de l’encre dans l’eau. « Ce n’est pas fini, Luminographe ! » cria-t-il alors que son masque se fissurait complètement. « Tant qu’il y aura de la peur et de la honte dans le cœur des hommes, je reviendrai ! »

Puis il disparut dans un dernier tourbillon d’ombres, laissant la salle baignée d’une lumière douce et apaisante.

Luna se redressa, son pelage retrouvant progressivement sa couleur noire lustrée. « Tu as réussi, Léo, » dit-elle avec fierté. « Tu as trouvé ta vérité. »

« Est-il vraiment parti ? » demanda Léo, regardant l’endroit où Le Moqueur s’était tenu.

« Pas pour toujours, » répondit Luna honnêtement. « Il avait raison sur un point — tant que la peur et la honte existeront, il trouvera un moyen de revenir. Mais tu l’as considérablement affaibli, et il faudra beaucoup de temps avant qu’il puisse à nouveau représenter une menace. »

La salle commença à trembler autour d’eux, les murs s’effritant pour révéler un Lumigraph lumineux au-delà.

« Nous devons partir, » pressa Luna. « Ce lieu n’était maintenu que par son pouvoir. Sans lui, il va s’effondrer et retourner à l’état d’ombre dont il est né. »

« Comment rentrons-nous ? » demanda Léo, réalisant qu’il n’avait pas son carnet pour créer un portail.

Luna sourit, autant qu’une chatte pouvait sourire. « Tu n’as pas besoin du carnet, Léo. Tu es un Luminographe. La porte est en toi. »

Léo ferma les yeux, visualisant sa chambre, son monde, Tom qui devait l’attendre avec inquiétude. Il tendit la main, dessinant dans l’air le contour d’une porte avec son doigt.

À sa grande surprise, une ligne lumineuse suivit son mouvement, créant une porte de lumière dans l’air même. À travers elle, il pouvait voir le parc derrière le gymnase du lycée, où Tom semblait attendre, l’air désespéré.

« Après toi, » dit Luna en bondissant vers la porte.

Ensemble, ils franchirent le portail, laissant derrière eux la Salle des Miroirs qui s’effondrait dans un silence lumineux.

— ⭐ —

L’aventure continue !

In Mamie Aurore's art studio, an elegant shadow figure with a blue crystal crown looms. A dark-skinned boy with curly black hair and adventurous smile stands nearby. Title 'Emilie' and subtitle 'My Story Show' in vibrant frost palette. Cel-shaded magical silhouettes.

Identifiant de l’histoire : 38