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Les jours suivants, Julie et Martin établirent une routine. Chaque matin, dès que Myrielle partait pour ses activités écologiques, ils s’enfonçaient dans la forêt, guidés par l’amulette qui brillait toujours plus intensément lorsqu’ils se dirigeaient vers le nord. Choupette les accompagnait, ses sens félins en alerte, prête à les avertir du moindre danger.

Ils avaient préparé des sacs à dos avec tout ce dont ils pourraient avoir besoin: la Graine d’Espoir soigneusement emballée dans un mouchoir en tissu, les Fleurs des Souvenirs séchées, l’eau de l’Étang des Possibles, ainsi que des provisions – des sandwichs préparés par Julie avec les légumes du jardin de leur mère, des fruits, et des gourdes d’eau.

Martin avait aussi apporté sa tablette, sur laquelle il notait méticuleusement chaque découverte, dessinait des cartes des sentiers qu’ils empruntaient, et prenait des photos des endroits les plus remarquables. À la surprise de Julie, son frère s’était complètement investi dans leur quête, délaissant même ses jeux vidéo.

« Tu sais, » lui dit-il alors qu’ils franchissaient un petit ruisseau en sautant de pierre en pierre, « c’est comme si j’avais toujours su qu’il y avait quelque chose de spécial dans cette vallée. J’avais juste… oublié de regarder. »

Julie lui sourit. « C’est ce que Mamie Rose a dit: les adultes oublient comment voir l’invisible. »

« Je ne suis pas un adulte! » protesta Martin, faussement offensé.

« Tu es entre les deux, » ronronna Choupette qui les précédait sur le sentier. « Assez grand pour comprendre les problèmes du monde, mais encore assez jeune pour croire qu’on peut les résoudre. »

Ce jour-là, ils s’aventurèrent plus loin que jamais. L’amulette les guidait vers une partie de la forêt qu’ils n’avaient jamais explorée, plus dense et plus sauvage. Les arbres y étaient immenses, leurs troncs couverts de mousse, leurs branches formant une cathédrale verte qui filtrait la lumière du soleil en rayons dorés.

« Cet endroit est différent, » murmura Julie, sentant une présence dans l’air, comme si la forêt elle-même était consciente de leur arrivée.

L’amulette contre sa poitrine brillait maintenant si fort que sa lueur verte transparaissait à travers son t-shirt.

« On doit être près du cœur de la vallée, » dit Martin en scrutant les alentours.

Choupette s’arrêta soudain, oreilles dressées. « Nous ne sommes pas seuls. »

Julie et Martin se figèrent, cherchant du regard ce qui avait alerté le chat. Pendant un instant, tout fut silencieux. Puis un bruissement se fit entendre dans les fourrés, suivi d’un petit rire cristallin.

« Qui est là? » appela Julie, serrant l’amulette dans sa main.

Une petite silhouette émergea d’entre les fougères. C’était une enfant, ou du moins quelque chose qui y ressemblait. Petite, avec une peau brune comme l’écorce des arbres, des cheveux verts semblables à des feuilles de fougère, et des yeux d’un doré profond. Elle portait ce qui semblait être une tunique tissée de mousses et de lichens.

« Bonjour, Porteurs d’Espoir, » dit la petite créature d’une voix qui rappelait le murmure d’un ruisseau. « Nous vous attendions. »

« Nous? » demanda Martin, regardant autour de lui.

Comme en réponse, d’autres petites silhouettes apparurent, sortant de derrière les arbres, émergeant des buissons, descendant des branches. Certaines ressemblaient à la première, d’autres avaient la peau bleue comme l’eau d’un lac, ou rouge comme les baies sauvages.

« Ce sont les Gardiens de la Forêt, » expliqua Choupette en s’asseyant calmement. « Les esprits mineurs qui aident Sylve – ou plutôt, qui l’aidaient avant qu’il ne devienne le Nuage Noir. »

La première créature s’avança vers Julie et s’inclina légèrement. « Je suis Mousse, gardienne des plantes qui poussent à l’ombre. Nous sommes les derniers d’entre nous à résister au désespoir qui a transformé notre maître. »

« Vous pouvez nous aider à trouver le cœur de la vallée? » demanda Julie, émerveillée par ces êtres fantastiques.

Mousse hocha la tête, ses cheveux verts ondulant comme des fougères dans la brise. « Nous pouvons faire plus que cela. Nous pouvons vous aider à préparer le sol pour la Graine d’Espoir. Mais d’abord, vous devez comprendre ce que vous affrontez vraiment. »

Elle fit un geste de la main, et l’air devant eux sembla onduler, formant des images: la vallée, vue de haut, verdoyante et pleine de vie.

« Il y a très longtemps, » commença Mousse, « notre vallée était protégée par Sylve, l’Esprit Gardien. Il veillait sur chaque plante, chaque animal, chaque goutte d’eau. Les humains qui vivaient ici respectaient la nature et prenaient seulement ce dont ils avaient besoin. »

L’image changea, montrant des usines, des routes, des maisons qui grignotaient la forêt.

« Puis les humains ont commencé à changer. Ils ont oublié les anciennes façons. Ils ont coupé les arbres, pollué les rivières, chassé les animaux jusqu’à ce que certains disparaissent à jamais. »

L’image suivante montrait Sylve, non pas sous forme de nuage noir, mais comme une magnifique créature faite de lumière verte et dorée, à l’apparence mi-humaine, mi-végétale.

« Sylve a d’abord essayé de leur rappeler l’équilibre. Il a envoyé des signes: des fleurs qui poussaient en hiver, des animaux qui se montraient aux humains respectueux, des arcs-en-ciel qui apparaissaient même sans pluie. Mais les humains modernes ne savaient plus lire ces signes. »

L’image de Sylve s’assombrit graduellement.

« La douleur de voir son domaine détruit a commencé à le changer. Sa lumière s’est éteinte. Sa joie s’est transformée en colère, puis en désespoir. Et finalement… »

L’image montra Sylve devenant le Nuage Noir que Julie et Martin connaissaient.

« Il a décidé que si l’espoir ne fonctionnait pas, peut-être que la peur le ferait. Il a commencé à répandre l’anxiété, pensant que cela pousserait les humains à changer leurs comportements. »

Mousse fit disparaître les images d’un geste de la main.

« Mais la peur ne fonctionne pas non plus, » dit-elle tristement. « Elle paralyse. Elle divise. Elle fait que les humains se replient sur eux-mêmes au lieu de s’unir pour trouver des solutions. »

« C’est exactement ce que j’ai ressenti, » murmura Julie. « J’avais tellement peur pour la planète que je n’arrivais plus à rien faire. Je pleurais le soir dans mon lit, mais je ne savais pas quoi faire. »

Mousse posa une petite main sur celle de Julie. Sa peau était douce comme de la mousse fraîche. « C’est pourquoi tu as été choisie, Julie. Tu ressens profondément la souffrance de la Terre, mais tu n’as pas encore perdu ta capacité à espérer. »

« Et moi? » demanda Martin. « Pourquoi est-ce que je peux voir tout ça aussi? »

Un autre gardien s’avança, celui-ci avec une peau bleue comme l’eau et des cheveux qui semblaient faits de gouttes de rosée. « Toi, Martin, tu représentes ceux qui se sont détournés de la nature pour se réfugier dans des mondes artificiels. Mais tu as gardé une étincelle de curiosité, une ouverture à l’émerveillement. C’est cette étincelle qui t’a permis de voir. »

Julie regarda son frère avec un nouveau respect. Elle n’avait jamais pensé qu’il puisse avoir un rôle aussi important dans cette aventure.

« Le cœur de la vallée est proche, » dit Mousse en pointant vers une colline qui s’élevait au loin. « C’est là que vous devez planter la Graine d’Espoir. Mais avant, vous devez comprendre une chose importante: la graine ne poussera que si vous êtes vraiment prêts à vous engager. »

« Nous engager? » répéta Julie.

« Oui. La Graine d’Espoir n’est pas magique en elle-même. Elle amplifie ce qui existe déjà dans vos cœurs. Si vous plantez la graine mais retournez ensuite à vos vies sans rien changer, elle se fanera et mourra, tout comme Sylve. »

Cette révélation laissa Julie et Martin silencieux. Ils n’avaient pas réalisé que la quête ne s’arrêterait pas à la plantation de la graine.

« Êtes-vous prêts à devenir les nouveaux gardiens de cette vallée? » demanda Mousse, son regard doré intense et sérieux. « À être les porte-parole de la nature auprès des autres humains? À montrer par l’exemple qu’un autre chemin est possible? »

Julie hésita. C’était une grande responsabilité pour une enfant de sept ans. Elle regarda Martin, cherchant son soutien.

À sa surprise, ce fut son frère qui répondit en premier: « Oui, nous sommes prêts. En fait, je pense qu’on a déjà commencé. »

Julie sourit, touchée par sa détermination. « Martin a raison. Nous voulons aider. Mais… comment faire? Nous ne sommes que des enfants. »

Mousse sourit, révélant des dents qui ressemblaient à de minuscules fleurs blanches. « Les enfants sont souvent les meilleurs gardiens. Vous voyez le monde avec des yeux neufs. Vous n’êtes pas encore emprisonnés dans les habitudes qui détruisent la Terre. Et vous pouvez influencer les adultes autour de vous, à commencer par votre mère. »

« Maman est déjà très écolo, » fit remarquer Julie.

« Oui, » acquiesça Mousse. « Elle fait partie de ceux qui n’ont pas totalement oublié. Mais même elle pourrait faire plus, si elle était guidée par l’espoir plutôt que par le devoir. »

Les gardiens les guidèrent ensuite vers la colline. Au fur et à mesure qu’ils avançaient, Julie remarqua que l’environnement changeait. Les arbres devenaient plus anciens, plus majestueux. Des fleurs qu’elle n’avait jamais vues auparavant parsemaient le sol – des fleurs aux couleurs si vives qu’elles semblaient presque lumineuses.

L’air lui-même paraissait différent, plus vibrant, chargé d’une énergie qui faisait frissonner Julie agréablement.

« Nous approchons d’un lieu sacré, » expliqua Choupette, marchant maintenant avec une sorte de révérence. « L’un des derniers endroits où la magie de la nature s’exprime pleinement. »

Ils arrivèrent finalement au pied de la colline. Un sentier serpentait jusqu’à son sommet, bordé de pierres anciennes couvertes de symboles étranges.

« Ces marques ont été laissées par les premiers humains qui ont habité la vallée, » dit Mousse. « Elles racontent l’histoire de leur alliance avec Sylve et les gardiens. »

Julie passa ses doigts sur les symboles, sentant une connexion avec ces ancêtres lointains qui avaient compris l’importance de vivre en harmonie avec la nature.

Soudain, le ciel s’assombrit. Un vent glacial se leva, faisant tourbillonner les feuilles mortes. Les petits gardiens se recroquevillèrent, effrayés.

« Il arrive, » murmura Mousse. « Le Nuage Noir a senti ce que vous vous apprêtez à faire. »

Effectivement, une masse sombre apparut à l’horizon, se déplaçant à une vitesse alarmante vers la colline. Cette fois, le Nuage Noir semblait plus grand, plus menaçant que jamais.

« Vite! » cria Martin. « Nous devons atteindre le sommet avant lui! »

Ils se mirent à courir le long du sentier, guidés par les gardiens qui connaissaient chaque pierre, chaque racine. Choupette bondissait devant eux, son pelage roux brillant comme une flamme dans la pénombre grandissante.

Le Nuage Noir se rapprochait inexorablement, projetant des tentacules de fumée devant lui comme pour les saisir. Le vent hurlait maintenant, portant des murmures désespérés: « Abandonnez… Fuyez… Tout est perdu… »

Julie serra l’amulette contre son cœur, puisant du courage dans sa chaleur rassurante. Elle pouvait sentir la Graine d’Espoir dans son sac à dos, pulsant comme un petit cœur, répondant à la proximité du lieu sacré.

Ils atteignirent enfin le sommet de la colline. C’était un espace circulaire, couvert d’une herbe si verte qu’elle semblait irréelle. Au centre se trouvait une pierre plate, parfaitement ronde, sur laquelle des symboles similaires à ceux du sentier formaient une spirale complexe.

« La Pierre du Cœur, » souffla Mousse. « C’est ici que vous devez planter la Graine. »

Julie sortit précipitamment la Graine d’Espoir de son sac. Elle brillait maintenant d’une lumière dorée intense, presque aveuglante.

Mais avant qu’elle ne puisse atteindre la pierre, le Nuage Noir les engloutit. Tout devint sombre et froid. Julie ne voyait plus rien, pas même Martin qui se tenait pourtant juste à côté d’elle.

« Tu ne peux pas gagner, petite humaine, » gronda la voix du Nuage, résonnant dans sa tête. « Regarde la vérité en face. »

Des images terrifiantes défilèrent dans l’esprit de Julie: des forêts entières réduites en cendres, des océans remplis de plastique, des animaux agonisant dans un monde devenu hostile. Mais cette fois, les images semblaient plus personnelles, plus proches: sa propre vallée dévastée, le jardin de sa mère desséché, Choupette et les gardiens disparus…

« Non! » cria-t-elle, luttant contre ces visions. « Ce n’est pas la seule vérité! Ce n’est qu’un possible futur, pas une certitude! »

Elle essaya d’avancer vers la Pierre du Cœur, mais ses jambes semblaient paralysées par un poids invisible.

« Julie! » La voix de Martin lui parvenait, étouffée. « Utilise l’amulette! Rappelle-toi ce que Mamie Rose a dit! »

L’amulette! Julie la serra dans sa main, concentrant toutes ses pensées sur elle. « Aide-moi, s’il te plaît, » murmura-t-elle.

L’amulette s’illumina, repoussant légèrement les ténèbres autour d’elle. Julie pouvait maintenant voir Martin qui luttait lui aussi pour avancer, et Choupette dont le pelage brillait comme une lueur d’espoir dans l’obscurité.

« Souvenez-vous! » cria Mousse, sa petite voix perçant à peine le rugissement du vent. « Souvenez-vous pourquoi vous faites cela! »

Julie ferma les yeux et pensa à tout ce qu’elle aimait dans la nature: le chant des oiseaux au printemps, la fraîcheur d’un ruisseau entre ses doigts, l’odeur des pins après la pluie, la joie de découvrir un papillon rare…

L’amulette brilla plus fort, repoussant davantage les ténèbres. Julie fit un pas, puis un autre. Elle pouvait maintenant voir la Pierre du Cœur, à seulement quelques mètres devant elle.

« Tu ne pourras jamais la rejoindre, » grogna le Nuage Noir. « Ta détermination s’épuisera, comme celle de tous les humains avant toi. »

C’est alors que Julie eut une idée. « Tu as raison, » dit-elle calmement.

Le Nuage sembla surpris par cet aveu. « Tu… tu abandonnes? »

« Non. J’accepte que je ne peux pas le faire seule. Personne ne le peut. C’est pourquoi nous devons travailler ensemble. »

Elle tendit la main vers Martin, qui la saisit fermement. Puis elle s’adressa directement au Nuage Noir: « Sylve, je sais que tu souffres. Je sais que tu as perdu espoir. Mais regarde ce que ta souffrance a créé: elle nous a réunis, mon frère et moi. Elle a réveillé notre conscience. Elle nous a fait voir ce que nous n’aurions peut-être jamais remarqué. »

Le Nuage Noir vacilla légèrement, comme déstabilisé par ses paroles.

« Ta colère était justifiée, » poursuivit Julie. « Mais elle t’a transformé en ce que tu combattais: une force de destruction, pas de protection. Aide-nous à restaurer l’équilibre, au lieu de nous empêcher d’essayer. »

Pendant un long moment, rien ne se passa. Puis, lentement, le Nuage Noir commença à s’éclaircir autour d’eux. Non pas à disparaître, mais à changer, devenant moins opaque, moins menaçant.

« Tu… tu crois vraiment que c’est possible? » La voix semblait maintenant plus incertaine, presque vulnérable.

« Je ne sais pas, » répondit honnêtement Julie. « Mais je crois que nous devons essayer. Pas parce que le succès est garanti, mais parce que l’alternative – ne rien faire – est inacceptable. »

Le Nuage s’écarta légèrement, créant un passage vers la Pierre du Cœur. Ce n’était pas une reddition, mais peut-être le début d’une trêve.

Julie et Martin avancèrent ensemble, suivis par Choupette et les petits gardiens. Arrivée devant la pierre, Julie s’agenouilla et déposa doucement la Graine d’Espoir au centre de la spirale gravée.

Mais au moment où elle allait la planter, elle réalisa qu’il manquait quelque chose.

« La terre, » dit-elle, perplexe. « La pierre est trop dure. Comment planter la graine? »

C’est alors que le Nuage Noir fit quelque chose d’inattendu. Une partie de lui se détacha et tourbillonna jusqu’au sol, puis se transforma en une fine couche de terre riche et noire, exactement au centre de la pierre.

« Une partie de moi, » dit-il, sa voix moins menaçante qu’auparavant. « Pour que vous compreniez que même dans le désespoir, il peut y avoir un début d’espoir. »

Julie regarda cette offrande avec étonnement. Elle plaça délicatement la Graine d’Espoir dans cette terre, puis, suivant son instinct, versa dessus quelques gouttes de l’eau de l’Étang des Possibles.

Dès que l’eau toucha la graine, une lumière aveuglante explosa du sol, si intense que tous durent détourner les yeux. Quand ils purent regarder à nouveau, un minuscule pousse verte avait émergé, ses premières feuilles déjà déployées vers le ciel.

« Ça a marché! » s’exclama Martin, incrédule.

Mais leur joie fut de courte durée. La petite pousse, après cette croissance initiale spectaculaire, semblait maintenant fléchir légèrement, comme si elle manquait de quelque chose d’essentiel.

« Que se passe-t-il? » demanda Julie, inquiète.

Mousse s’approcha et examina la pousse. « La Graine d’Espoir a besoin de plus que de la terre et de l’eau. Elle a besoin d’un engagement, d’une promesse sincère. »

« Quel genre de promesse? » demanda Martin.

« Une promesse de continuer ce que vous avez commencé ici, » expliqua Mousse. « De ne pas considérer cette plantation comme la fin de votre quête, mais comme son véritable début. »

Julie comprit alors. Elle posa sa main près de la pousse, sentant sa fragilité, sa vulnérabilité. « Je promets, » dit-elle solennellement, « de continuer à prendre soin de la nature, de parler pour ceux qui n’ont pas de voix, d’agir même quand c’est difficile, et de ne jamais perdre espoir, même dans les moments les plus sombres. »

Martin posa sa main à côté de celle de sa sœur. « Je promets de ne plus ignorer le monde réel pour me réfugier dans des mondes virtuels. D’utiliser ma créativité et ma technologie pour aider, pas pour fuir. De rappeler aux autres jeunes comme moi que notre futur dépend des choix que nous faisons aujourd’hui. »

Choupette s’avança et posa une patte sur la terre. « Je promets de continuer à être le lien entre les humains et la nature, de vous rappeler votre engagement quand vous risquez de l’oublier. »

Les petits gardiens formèrent un cercle autour de la pierre, chacun faisant sa propre promesse dans un langage que Julie et Martin ne comprenaient pas, mais dont ils sentaient la sincérité et la force.

Le Nuage Noir resta en retrait, observant. Il semblait hésiter, tiraillé entre méfiance et espoir.

« Et toi, Sylve? » demanda doucement Julie. « Quelle est ta promesse? »

Le Nuage s’agita, comme mal à l’aise. « Je… je ne sais pas si je peux promettre de redevenir ce que j’étais. La douleur est trop profonde. »

« Alors promets simplement d’essayer, » suggéra Julie. « De donner une chance à notre espoir, comme nous donnons une chance à ton désespoir d’être entendu. »

Après ce qui sembla une éternité, le Nuage s’approcha et une partie de lui toucha délicatement la pousse. « Je promets… d’observer. De ne pas interférer avec votre tentative. Et si vous prouvez que j’ai tort, que l’espoir n’est pas qu’une illusion… alors peut-être que je pourrai commencer à guérir. »

Dès que ces mots furent prononcés, la pousse se redressa. Ses feuilles s’élargirent, et une lueur dorée pulsa le long de sa tige, comme une sève lumineuse.

Mais au moment où ils commençaient à célébrer ce petit miracle, un bruit sourd résonna dans la vallée. Le sol trembla légèrement sous leurs pieds.

« Qu’est-ce que c’était? » demanda Martin, alarmé.

Mousse et les autres gardiens échangèrent des regards inquiets. « Quelque chose se passe dans la vallée, » dit Mousse. « Quelque chose qui menace tout ce que nous venons d’accomplir. »

Le Nuage Noir s’éleva plus haut, comme pour avoir une meilleure vue. « Des machines, » gronda-t-il. « Des machines qui détruisent la forêt au pied de la montagne Est. »

Julie sentit son cœur se serrer. La montagne Est, c’était là où se trouvait leur maison, là où vivait leur mère.

« Nous devons y aller! » s’écria-t-elle. « Nous devons voir ce qui se passe! »

Choupette bondit vers le sentier qui descendait de la colline. « Suivez-moi! Je connais un chemin plus rapide! »

Ils dévalèrent la pente, laissant derrière eux la Pierre du Cœur et la jeune pousse de la Graine d’Espoir, fragile promesse d’un avenir différent, maintenant menacée par une réalité brutale qu’ils n’avaient pas anticipée.

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