Les Montagnes du Temps Suspendu se dressaient majestueusement devant eux, leurs pics enneigés perçant les nuages comme des lances de cristal. Le tunnel secret les avait menés à l’orée d’une vallée alpine où l’air était si pur qu’il semblait scintiller. Des fleurs aux pétales iridescents poussaient le long du sentier, et de petits ruisseaux chantants serpentaient entre les rochers moussus. Le temps lui-même semblait différent ici, plus lent, plus paisible.
Alexandre et le Schtroumpf à lunettes avaient marché toute la nuit. Le garçon portait son petit compagnon sur son épaule, ses cheveux blonds ébouriffés par le vent de montagne. Malgré sa fatigue, il ressentait une étrange sérénité qu’il n’avait jamais connue auparavant.
« Nous y sommes presque, » annonça le Schtroumpf à lunettes en consultant une carte ancienne ornée de symboles mystiques. « Le Temple des Trois Gardiens se trouve au sommet de cette montagne. »
Ils approchaient d’un pont de corde suspendu au-dessus d’un ravin vertigineux. Le pont semblait ancien, ses planches de bois grinçaient doucement dans la brise. En dessous, un brouillard épais masquait le fond du gouffre.
« Il a l’air solide ? » demanda Alexandre avec inquiétude.
« Selon mes calculs, il devrait supporter notre poids, » répondit le Schtroumpf à lunettes en ajustant ses lunettes. « Mais il faut y aller lentement et calmement. »
Alexandre posa prudemment le pied sur la première planche. Elle tint bon. Il avança pas à pas, se concentrant sur sa respiration comme le Schtroumpf à lunettes le lui avait enseigné. À mi-chemin, une bourrasque de vent fit osciller dangereusement le pont.
Son premier réflexe fut de courir pour atteindre l’autre côté plus vite. Mais il se souvint des leçons apprises dans la grotte. Il s’arrêta, prit une grande inspiration, et attendit que le vent se calme.
« Excellent, Alexandre ! » l’encouragea le Schtroumpf à lunettes. « Tu apprends à maîtriser tes impulsions ! »
Ils atteignirent l’autre côté sains et saufs. Devant eux s’élevait un escalier taillé dans la roche, qui serpentait vers le sommet de la montagne. Chaque marche était ornée d’un symbole différent : une tortue, un arbre, une goutte d’eau…
« Ces symboles représentent les leçons de patience, » expliqua le Schtroumpf à lunettes. « Chaque marche nous enseigne quelque chose. »
Ils commencèrent l’ascension. Sur la marche de la tortue, Alexandre sentit ses mouvements se ralentir naturellement. Sur celle de l’arbre, il eut l’impression de s’enraciner solidement. La goutte d’eau lui apporta une sensation de fluidité et d’adaptation.
Arrivés au sommet, ils découvrirent un temple circulaire aux colonnes de marbre blanc. Au centre se tenaient trois figures mystérieuses, chacune incarnant une émotion différente.
La première était la Gardienne de la Sérénité, une femme aux cheveux bleu clair qui flottaient comme des nuages. Elle portait une robe couleur ciel et ses yeux brillaient d’une lumière douce et apaisante.
Le deuxième était le Gardien de la Réflexion, un homme âgé à la barbe argentée, vêtu d’une robe couleur terre. Ses mains tenaient un livre ouvert qui semblait contenir toute la sagesse du monde.
La troisième était la Gardienne de l’Acceptation, une jeune femme aux cheveux verts comme les feuilles de printemps. Sa robe changeait de couleur selon ses mouvements, passant du rouge au bleu, du jaune au violet.
« Soyez les bienvenus, voyageurs, » dit la Gardienne de la Sérénité d’une voix mélodieuse. « Nous savons pourquoi vous êtes ici. »
« Impatraccus menace notre monde, » expliqua rapidement Alexandre. « Nous avons besoin de votre aide pour récupérer le Cristal de la Patience ! »
Le Gardien de la Réflexion leva la main. « Jeune homme, avant de demander notre aide, tu dois prouver que tu as appris les leçons de la patience. »
« Quelles leçons ? » demanda Alexandre, sentant son impatience revenir.
La Gardienne de l’Acceptation sourit. « Tu vas passer trois épreuves. Chacune testera un aspect de ta relation avec le temps et l’attente. »
Une première épreuve apparut devant eux : un puzzle complexe fait de pièces de cristal qui flottaient dans l’air. Les pièces bougeaient lentement, et il fallait les assembler pour former une image.
« Tu as tout le temps nécessaire, » dit la Gardienne de la Sérénité. « Mais tu ne peux toucher chaque pièce qu’une seule fois. »
Alexandre observa attentivement le puzzle. Son instinct lui disait de saisir les pièces rapidement, mais il se força à étudier d’abord le motif. Graduellement, il distingua l’image d’un arbre aux branches entrelacées. Il plaça chaque pièce avec précaution, prenant le temps de vérifier sa position avant de la fixer.
Quand le puzzle fut terminé, l’arbre de cristal s’illumina magnifiquement.
« Première épreuve réussie, » approuva le Gardien de la Réflexion. « Tu as appris à observer avant d’agir. »
La deuxième épreuve était différente : Alexandre devait faire pousser une fleur magique en lui chantant une berceuse, mais la fleur ne pousserait que s’il chantait assez lentement et avec suffisamment de douceur.
Alexandre commença trop vite, et la fleur se rétracta. Il recommença, se souvenant de la mélodie que le Schtroumpf à lunettes avait utilisée contre Impatraccus. Cette fois, il chanta lentement, avec patience. La fleur s’épanouit peu à peu, révélant des pétales aux couleurs de l’arc-en-ciel.
« Deuxième épreuve réussie, » dit la Gardienne de l’Acceptation. « Tu as appris que certaines choses ne peuvent être précipitées. »
La troisième épreuve était la plus difficile : Alexandre devait rester parfaitement immobile pendant que des illusions d’Impatraccus tentaient de le provoquer.
Les illusions lui montraient le village des Schtroumpfs en train d’être détruit, ses amis en danger, le Cristal de la Patience qui se brisait. Chaque image était conçue pour le faire réagir impulsivement.
Alexandre serra les poings, luttant contre l’envie de bouger. Il ferma les yeux et se concentra sur sa respiration, comme le Schtroumpf à lunettes le lui avait enseigné. Graduellement, il réalisa que ces images n’étaient que des peurs, pas la réalité.
Quand il rouvrit les yeux, les illusions avaient disparu.
« Troisième épreuve réussie, » déclara solennellement le Gardien de la Réflexion. « Tu as appris à distinguer l’urgence réelle de l’anxiété. »
Les trois Gardiens se rapprochèrent d’Alexandre. Ensemble, ils posèrent leurs mains sur ses épaules. Une lumière dorée l’enveloppa, et il sentit une force nouvelle naître en lui.
« Nous te donnons le Don de la Patience Éclairée, » dit la Gardienne de la Sérénité. « Tu pourras maintenant résister à la magie d’Impatraccus et aider les autres à retrouver leur calme. »
« Mais rappelez-vous, » ajouta la Gardienne de l’Acceptation, « ce don ne supprime pas votre impatience. Il vous aide à la transformer en énergie positive. »
Soudain, un tremblement ébranla la montagne. Au loin, une colonne de lumière violette s’élevait du village des Schtroumpfs.
« Impatraccus accélère le processus ! » s’écria le Schtroumpf à lunettes. « Il absorbe l’énergie du cristal ! »
« Nous devons y aller maintenant ! » dit Alexandre, mais cette fois, son urgence était différente. Elle n’était plus paniquée, mais déterminée et réfléchie.
Les Gardiens hochèrent la tête. « Allez-y, jeune héros. Vous êtes prêts. »
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L’aventure continue !
Identifiant de l’histoire : 87